Les QRC – Coûts relatifs à la qualité

INTRODUCTION

Depuis 1951, J.M. Juran faisait la promotion de diverses approches de résolution de problème, car il était acquis que si les professionnels en qualité voulaient obtenir l’attention des gestionnaires et il était impératif de parler le même langage, c’est-à-dire en $. Afin d’être mieux entendu par les actionnaires et gestionnaires, même aujourd’hui, la première stratégie qualité est de démontrer par des données financières et une analyse économique pertinente comment il est possible d’optimiser les marges de profits.

Ce n’est pas un nouveau concept innovant mais aujourd’hui, seulement certaines organisations ont mis en place des approches de mesures de coûts qui peuvent s’expliquer par plusieurs situations :

  • Les normes qualité comme ISO9001 n’ont pas d’exigences claires de mesure de coûts.
  • Les formations comptables n’incluent pas ou peu d’importance pour connaitre et comprendre ces coûts pour optimiser les résultats financiers (vision plutôt tunnel), car ces coûts sont cachés ou invisibles.
  • Le modèle économique de croissance peut rendre invisible le besoin de réduire les gaspillages et les pertes.
  • Quand un manque de personnel et de temps est important, les décisions opérationnelles sont souvent orientées sur les volumes de ventes en premier plutôt que sur l’efficacité.

Depuis l’an passé, la norme AS13100 a fait réapparaitre l’exigence de réaliser des mesures de coûts qualité comme moyen de mesure pour la réduction des risques et des produits non conformes.

La littérature à montrer depuis plus de 60 ans une évolution d’approches différentes : système de coût qualité, coûts de non-qualité, économie de la qualité, etc. La qualité n’est pas une affaire d’improvisation mais plutôt de communication basée sur des faits. C’est pourquoi la compréhension des coûts prend du temps et de la patience.

Je vous propose plutôt de parler d’une approche QRC – CRQ ‘Couts relatifs à la Qualité’, plus ouverte et adaptable au contexte de différentes entreprises, incluant une réflexion sur le sujet et quelques moyens possibles pour mettre en place une approche de mesures pour ces coûts.

Aussi, le tableau suivant montre en ordre les préoccupations stratégiques priorisées suite à la mise en place des mesures de QRC.

Ces préoccupations sont aussi traduites en actions stratégiques tout en prenant en compte les évolutions des exigences des clients et des technologies.

COÛTS RELATIFS À LA QUALITÉ

Pour commencer, je vous propose sans entrer dans trop de détails, l’idée de mesure traditionnelle des coûts qualité et de non-qualité et de l’utilité dans la prise de décision possible au quotidien.

RAISONS

Initialement, 2 raisons principales motivaient des mesures de coûts qualité :

  • Une mise en place selon la norme MIL-Q-9858A pour certaines organisations (1972)
  • Avoir une approche économique de mettre en place de type de système.

Aujourd’hui, la norme ISO10014 nous propose un modèle de mesure de coûts économique relatif à la qualité sous forme de guide pour les organisations qui désire s’en inspirer et mettre en place ce type de mesures.

POURQUOI ?

Même si cette approche est seulement quelquefois utilisée, cette exigence est demandée par exemple dans la nouvelle norme AS13100, car il y a corrélation directe entre la politique du zéro-défaut, la sureté des produits et la détection des risques potentiels de sécurité pour les usagers dans le secteur aéronautique. Le volet économique se traduit alors par les gains obtenus d’action corrective, d’initiative d’amélioration continue et de prévention.

QUOI MESURER ?

L’histoire nous montre au fil du temps qu’il est possible de regrouper les divers coûts par catégories (approche traditionnelle de mesure des coûts). Ces catégories et leurs contenus ont évolué dans le temps. Je crois aussi que cette approche pratico-pratique est toujours d’actualité pour les gestionnaires, car elle facilite la collecte des informations quand on peut utiliser des systèmes informatiques qui ont la plupart du temps une approche de structure de coûts.

Pour les mesures et la collecte d’informations, il est en général plus facile de mesurer les types de coûts dans l’ordre suivant:

  • Coûts des défauts et des problèmes aux produits et services

Ce sont souvent les coûts non contrôlables. L’emphase est aussi mise sur les coûts indirects, les coûts de corrections et les pertes. Cette catégorie peut expliquer les décisions pour l’application de moyens de contrôle et de prévention. (Rebuts, retouches, réparations, reprise de documents, traitement des NC, modifications, appel de services, TI. EHS, surcout des fournisseurs, etc.)

  • Coûts de contrôle (inspections, suivi, etc.)

Ce sont les efforts mis en place pour mesurer la qualité des produits et détecter les défauts potentiels, soit lorsque des exigences des clients et des normes sont requises, soit par des décisions techniques. L’emphase est alors mise sur risques concernant les caractéristiques des produits qui affectent la qualité des produits, la sécurité, le cycle de vie et les obligations de garantie, etc.  (inspection, relâche de produits, validation, etc.)

  • Coûts de prévention

Ce sont les efforts d’initiatives mises en place pour résoudre les causes des problèmes de fabrication et de conceptions choisis afin de prévenir les problèmes de qualité des produits chez les utilisateurs. (Gestion qualité, formation, étalonnage, certification, ing. qualité, projet d’amélioration, etc.)

ÉVOLUTION DES CATÉGORIES

Ensuite, la catégorie des coûts de défauts à évoluer pour mettre en évidence les coûts des défauts d’origine interne et externes (garanties, pénalité, dommage, pertes de revenu, etc.). Ce changement permet alors de calculer des ratios et leurs impacts chez les clients avec une approche plus économique.

Plus récemment, un modèle plus avancé va ajouter une cinquième catégorie pour les coûts cachés. Si l’on regarde les histoires d’entreprises dans les journaux et revues spécialisées, il existe plusieurs d’exemples de coûts cachés (image de l’Iceberg sous l’eau) qui ont un impact majeur, sinon catastrophique sur la viabilité des organisations.

Donc, par où commencer…

ÉTAPES DE MISE EN PLACE DE MESURE DE CRQ (Coûts relatifs à la qualité)

L’objectif d’un système de mesure de coût qualité est de fournir un produit conforme et acceptable en utilisant un modèle économique optimal dans les temps. Une mise en garde ici est requise : pour certaines organisations, le concept de ‘Fitness for Use’ peut s’appliquer, pour d’autres, ce concept est peu ou pas applicable. Ce concept fait référence à la tolérance au risque, qui est différente pour chacun de nous. Par contre, la notion de conformité fait référence à la satisfaction du client et la sûreté du produit.

Pour y arriver, je propose :

Étapes 1 : Connaitre les coûts que l’on a besoin de mesurer.

Étape 2 : Vendre au management l’importance de comprendre les QRC

L’avantage principal est de montrer dans une structure compréhensive et consolidée les informations concernant les coûts relatifs à la qualité (indirectement ou indirectement comptabilisé).

La conversion en $ est la pierre angulaire de connaitre quels sont les coûts réels d’inefficacité et de gaspillages d’un point de vue management et de justifier l’importance d’un système de coûts relatifs à la qualité.

Étape 3 : Réaliser un projet pilote positif (gains importants)

Cette étape permet de définir les coûts facilement mesurables et de montrer l’état des lieux dans un projet pilote. Il est important d’aligner les mesures de coûts avec le service comptable pour de valider les informations.

Étape 4 : Faire l’analyse des résultats

Il est important d’analyse les résultats et de mettre en évidence les catégories de coûts afin de montrer l’état réel vs le potentiel d’amélioration. L’utilisation de ratio dans les calculs peut alors être utilisée en KPI dans un tableau de bord au plan stratégique.

Aussi, pour chaque élément de catégorie, il est possible d’analyser avec un Pareto les sous-catégories afin d’identifier les « vital few » significatifs.

Étape 5 : Élaborer un système complet en accord avec les besoins

Suite à un bilan du projet pilote, il est important de préciser et faire évoluer le QRC afin d’obtenir un modèle efficace et fiable de mesures pour supporter les initiatives d’action corrective, de résolution de problème et de projet d’amélioration.

Étape 6 : Sensibiliser et former les équipes

Il est important qu’une fois le système établit, de former les gestionnaires impliqués dans cette approche de mesures QRC. Une démonstration économique de la philosophie et du processus doit être faite pour assurer le succès du processus. Ceci peut se faire part des rencontres de sensibilisation et de formation, par exemple.

Étape 7 : Automatiser les mesures

Il est important ci-possible d’automatiser les mesures et/ou de rendre simple et efficace la collecte des mesures afin que les coûts du processus lui-même ne soient pas un coût a non-valeur ajoutée.

Étape 8 : Publication des résultats et actions d’améliorations

Avec les moyens technologiques aujourd’hui, il est préférable d’avoir des systèmes en temps réel, sinon d’avoir une publication des résultats le plus rapidement possible (mensuellement, aux semaines, aux 3 mois) selon les types de mesures.

Une bonne pratique est de faire une revue de direction par exemple au 3 mois pour bien comprendre et se souvenir de l’évolution des résultats et d’initier des projets et des actions dans un délai opportun.

MOYENS

Les résultats peuvent être consolidés dans un tableau de bord, par exemple sous un format Excel ou en utilisant une application comme Power BI par exemple. Ceci peut faciliter le calcul de ratio de performance et la création de graphiques avec des cibles à atteindre et des courbes de tendances.

Mon expérience m’a démontré qu’il est pertinent de comparer les résultats des coûts avec des indicateurs autres que financiers tels que, le nombre de projets, le nombre de produits NC, nombre de plaintes clients, de dérogations, de réparations, de rebuts, mesurés %, ppm ou de DPMO, par exemple.

Aussi, si l’on veut que les mesures soient à valeurs ajouter, il est important de partager et communiquer les résultats avec toutes les équipes de l’organisation sur une base périodique, idéalement en temps réel. Attention de ne pas mesurer des résultats seulement pour la direction, ceci n’apportera peu ou pas de mobilisation des équipes à s’améliorer et à proposer des solutions, car en général, les équipes sont capables de s’automotiver e d’être en mode solution rapidement. Cette approche est aussi un autre élément clé de démonstration de leadership.

CONCLUSIONS

Naturellement, une bonne compréhension des mesures relative à la qualité est un élément de base fondamental pour mettre en place ces mesures.  Il existe plusieurs considérations importantes de mise en place des QRC dont les bénéfices sont :

  • Avoir une visibilité sur les coûts
  • Indication de direction pour des actions
  • Encourage le travail d’équipe
  • Montre les gains directs des coûts et l’impact sur les marges
  • Améliore la productivité, la qualité des produits, etc.

Selon Forbes, la qualité, l’esprit de collaboration et la communication ouverte a un effet positif direct sur la croissance des profits et le succès des initiatives d’améliorations. La transformation et les nouveaux moyens digitales donnent des approches nouvelles pour la gestion de la qualité.

CPS-conseils offre aussi une formation en ligne afin de démystifier les QRC. Cette approche est un regard possible dont les gestionnaires peuvent s’inspirer pour établir leurs mesures de QRC. dans leur organisation.

Ce sujet n’est pas une grande nouveauté dans le monde du management de la qualité, mais les éléments mesurés et les approches continuent d’évoluer dans le temps.

 

RÉFÉRENCES

  • C Rhodes, Implementing a Quality Cost System, Hercules Inc., Quality progress Feb 1971
  • Edgar, W Dawes, Quality costs – a tool for improving profits, quality progress, sept 1975
  • Alain M Chauvel, Yves A Andre, Quality cost: Better Prevent than Cure, Quality progress , Sept 1985
  • Matthew Littlefielf, Mehul Shah Étude Cost of Quality , Aberdeen Group, 2008
  • Matthew Littlefielf, Mehul Shah, Étude Cost of Quality , Aberdeen Group, 2009
  • Eric Hayler, The rising Economic Power of Quality, Forbes, 2017
AS9100D

Previous article

Qualité 4.0 et Stratégie